Formations sanitaires privées: plus de 3000 clandestins épinglés

Interview

 

« Le ministre leur a accordé 90 jours pour se conformer»

Dr Yves Mathieu Zoa Nanga, directeur de l’organisation des soins et de la technologie, ministère de la Santé publique.

Ce n’est pas la première fois que vous épinglez autant de formations sanitaires clandestines. Qu’est-ce qui va changer cette fois ?

Le processus ne s’arrête pas à leur identification. Il y a eu la démarche pédagogique. Le ministre leur a accordé 90 jours pour se conformer à la réglementation. Mais nous nous sommes rendu compte que les choses ne bougeaient pas. Maintenant, nous sommes dans la démarche de fermeture. Mais, comme c’est une démarche qui inclut plusieurs acteurs, elle appelle à se rassurer que toutes les parties prenantes sont conscientes du rôle qui est le leur. Et dès que la structure est fermée, elle est aussi scellée. Je crois que l’autorité administrative a tous les éléments qu’il faut pour veiller à ce que ces formations sanitaires restent fermées. Le deuxième aspect est la confiscation de tout le matériel ayant servi à poser ces actes. Dans ce cas, les ordres professionnels devraient pouvoir saisir la justice. Et même, en attendant une procédure judiciaire éventuelle, ils peuvent s’associer pour requérir le soutien des autorités administratives et faire confisquer ce matériel.

Après la fermeture, quelle sera la prochaine étape ?

La prochaine étape consiste à sortir de la confusion entre les cliniques ouvertes par les médecins du public et par les médecins qui disposent effectivement d’une autorisation d’exercice en clientèle privée. Il a été instruit à l’Ordre national des médecins de nous faire parvenir sous huitaine, la liste de tous les médecins autorisés à exercer en clientèle privée. Tout comme la liste des formations sanitaires dont les médecins ne disposent pas d’autorisation d’exercice en clientèle privée. Ces dernières seront fermées en première intention. La deuxième vague concerne les formations sanitaires ouvertes par des promoteurs autres que les médecins, les infirmiers, les chirurgiens dentistes. Ça aussi, c’est sur dénonciation sur le terrain. Nous avons  des noms. Mais, nous voulons nous rassurer que nous ne nous trompons pas. Ensuite, nous allons adresser à tous les gouverneurs et préfets, des listes consolidées des formations sanitaires à fermer. Nous sommes dans un processus qui regorge un jeu d’intérêts. Il ne faudrait pas y aller n’importe comment et créer des victimisations évitables. C’est pourquoi la démarche prend un peu de temps mais ce n’est pas pour reculer. C’est pour nous rassurer que tout le monde joue sa partition.

Propos recueillis par Elise ZIEMINE NGOUMOU

 

">

Les opérations de fermeture des établissements non conforme ont démarré lundi dernier à travers le pays.

La sensibilisation vient de céder le pas à la répression. Le ministère de la Santé publique (Minsanté) a décidé de passer à l’étape supérieure en déclarant la guerre aux formations sanitaires privées clandestines. Il vient à cet effet de procéder à la fermeture de cinq de ces établissements illégaux dans les régions du Centre et du NordOuest. Il s’agit là d’un long processus initié par le Minsanté en mars 2016, où l’on avait détecté 2 288 établissements sanitaires fonctionnant dans l’illégalité et 75 autres identifiés sans région d’implantation sur l’ensemble du territoire. Comme pour démontrer la profondeur du mal, l’on dénombre à ce jour 3058 formations sanitaires privées illégales. Toutes sont frappées par un ordre de fermeture. En procédant à cette opération d’assainissement, le ministère de tutelle veut amener les formations sanitaires concernées à régulariser leur situation administrative.

Si certains promoteurs de formations sanitaires privées, laïques ou confessionnelles opèrent en toute légalité, tel n’est pas le cas pour un bon nombre. Ils exploitent pour la plupart, des locaux à usage d’habitation pour exercer leurs activités. Ceci à tout bout de rue ou dans les quartiers à forte concentration de populations à faibles revenus. Ces centres de santé clandestins sont spécialisés dans la prise en charge des malades ou dans la formation du personnel soignant.

Dans l’un des centres de santé visités hier matin au quartier Melen à Yaoundé, une plaque renseigne sur les différents services offerts : analyse médicale, petite chirurgie, consultation médicale, accouchement et autres. Le logement présente des murs délabrés et pourtant, on se croirait dans un hôpital miniaturisé. Ce qui était supposé être des chambres a été transformé en salles de consultation, d’accouchement, d’hospitalisation ou en laboratoire d’analyses. Le service ici étant assuré par quelques hommes en blouse blanche, qu’une dizaine de patients attend. Difficile cependant d’en savoir plus sur leur niveau de formation. Si certains malades se contentent de leur prise en charge dans ces centres illégaux, d’autres, par contre, en gardent des souvenirs douloureux. « J’ai perdu ma petite sœur dans des conditions troubles dans l’un de ces endroits. Elle était à terme et la césarienne s’imposait pour sa survie. La formation sanitaire, bien que ne disposant pas d’un plateau technique adéquat, a quand même pris le risque de l’opérer. Elle n’a pas survécu », confie un habitant, l’air attristé.

Reactions

Commentaires

    List is empty.

Laissez un Commentaire

De la meme catégorie