« L’assurance est un bon moyen de reconstitution du patrimoine»

Théophile Moulong, président de l’Association des sociétés d’assurances du Cameroun.

Monsieur le président, que représente aujourd’hui le marché de l’assurance au Cameroun, en termes de contribution à l’économie et de taux de couverture ?

Je vous remercie tout d’abord pour l’intérêt que vous portez à notre secteur d’activité, contribuant ainsi à mieux le faire connaître. Le marché camerounais de l’assurance compte comme acteurs 28 compagnies d’assurances, donc 17 en non-Vie et 11 en Vie auxquelles il convient d’ajouter trois réassureurs. L’effectif en ressources humaines est d’environ 1 500 emplois directs ; sans compter le personnel des centaines de sociétés de courtage agréées et des agents généraux des compagnies. Le chiffre d’affaires consolidé en 2018 est de 206,7 milliards en progression de 4,9% par rapport 2017. En raison de la pandémie du COVID-19, plusieurs compagnies n’ont pas encore tenu leur conseil d’administration. Par conséquent, les statistiques de l’exercice 2019 seront communiquées plus tard. Mais déjà, en 2018, les assureurs ont réglé en sinistres et prestations 93,8 milliards contre 80,4 milliards en 2017, soit une progression de 13,4 milliards en valeur absolue et de 16,67% en valeur relative ; ce qui représente environ quatre fois l’augmentation du chiffre d’affaires dans le même période.

Mais concrètement, comment les assureurs contribuent-ils à l’économie ?

Les compagnies d’assurances sont des investisseurs institutionnels qui contribuent directement au financement de l’économie nationale à travers divers placements auprès des banques, de l’Etat et d’autres institutions. Pour vous donner un indicateur, en 2018, le secteur des assurances au Cameroun a réalisé plus de 400 milliards de placements. Cette importante contribution de notre secteur au dynamisme de l’économie pourrait significativement s’améliorer avec le transfert des provisions de l’Indemnité de fin de carrière (IFC) aux assureurs. C’est un des aspects qui justifient que notre marché soit classé deuxième dans l’espace CIMA derrière celui de la Côte d’Ivoire.

A l’observation, les Camerounais ne sont pas vraiment portés vers les assurances, se plaignant, pour ceux qui ont souscrit une police, de ce que le taux de paiement des sinistres est trop faible. Qu’est-ce que vous faites pour améliorer cette image ?

Les statistiques que je viens d’évoquer en ce qui concerne le règlement des sinistres disent le contraire. Il faut savoir que le règlement des sinistres est le cœur de métier des assureurs. C’est la raison d’être d’une compagnie d’assurances. Toutefois, je comprends les griefs qui peuvent nous être faits, parce que le règlement des sinistres obéit à une procédure qui implique des délais que nous nous attelons à raccourcir.  Il se trouve que l’assureur lui-même dépend dans ce process des prestataires externes dont il ne maîtrise pas toujours la durée de leurs actions. Je pense ainsi aux expertises, à la production des procès-verbaux d’accidents, avant que l’assureur ne procède au règlement. Vous comprenez donc que c’est plus une question de délai que de défaut de paiement. Le législateur prévoit des sanctions à l’encontre des compagnies dont la cadence de règlement des sinistres n’est pas jugée satisfaisante. 

S’agissant du second volet de votre question, au niveau de notre Association, plusieurs outils sont mis en place et qui fonctionnent avec pour objectif d’accélérer et de faciliter le règlement des sinistres. Nous pouvons citer la Commission nationale d’arbitrage et contentieux divers (CNA) qui permet d’éviter aux victimes de longues procédures judiciaires en cas de conflit sur la détermination des responsabilités. Il y a aussi le système d’indemnisation directe des assurés (IDA) qui donne la possibilité à deux assurés, en cas d’accident, d’établir eux-mêmes sur place, un constat amiable qu’ils produiront immédiatement chacun à son assureur. Vous constatez que c’est un gain de temps considérable.

Autre instrument, le Pool de transport public de voyageurs (TPV) qui s’occupe exclusivement de la centralisation de la production et du règlement des sinistres de cette catégorie du risque automobile. Le Pool est allé jusqu’à passer des accords avec des établissements hospitaliers à travers le territoire national pour une prise en charge systématique de toute victime d’accident sur les routes nationales et qui implique un véhicule de transport public de voyageurs. Enfin, le Bureau national de la carte rose CEMAC qui est un mécanisme mis en place par les Etats pour faciliter le règlement des sinistres transfrontaliers.

D’un autre côté, une enquête plus ou moins récente a montré que peu de Camerounais ont une connaissance des produits d’assurances. Quelles sont les actions que mène votre association ou les assureurs chacun dans son couloir, pour se faire connaître et accepter ?

Chaque compagnie mène des actions de sensibilisation par des campagnes promotionnelles et le développement de son réseau de distribution. En tant qu’Association, nous avons plusieurs initiatives de vulgarisation et de promotion de la culture de l’assurance en direction du grand public, à l’instar des journées de l’assurance, des séminaires dans les régions, des émissions de sécurité et de prévention routière, des conférences débats et des descentes dans les établissements d’enseignement secondaire et supérieur. Ce sont des occasions d’échange qui rassemblent plusieurs corps de métier et des cibles spécifiques comme les élèves et les étudiants de nos grandes écoles et Facultés, les magistrats, les Forces de maintien de l’ordre (FMO) et les syndicats des transporteurs.

Quels sont réellement les avantages pour un individu, une famille ou une entreprise, d’être assurée ?

Contrairement aux idées reçues, l’assurance est un produit de première nécessité et non un produit de luxe réservé aux plus nantis. Deux raisons plaident pour cette affirmation. La première est que l’assurance est un bon moyen de reconstitution du patrimoine en cas de sinistre et la seconde est que la couverture d’assurance permet la réparation des dommages causés à autrui et qui peuvent être largement au-dessus de nos moyens. A titre d’exemple, la reconstitution d’une industrie ou d’un fonds de commerce après un incendie n’est pas aisée sans la couverture d’une police d’assurance. Il en va de ...

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