« La qualité des auteurs indique, une intention de solidarité qui transcende les clivages Nord/Sud »

Dr Christian Pout, Internationaliste, directeur du Séminaire de Géopolitique africaine à l’Institut catholique de Paris – président Think Tank CEIDES

Le président de la République et une trentaine de chefs d’Etat et de gouvernement et des responsables des organisations internationales viennent de signer une tribune intitulée : « Un New Deal Pour l’Afrique ». Quelle lecture peut-on en faire ?
Disons-le d’emblée et sans détour, une exégèse de cette tribune impose d’abord de considérer les messagers et de s’intéresser ensuite aux messages véhiculés. La qualité des auteurs de cette communication majeure qui fera date, au rang desquels se trouve la plus Haute autorité de notre pays, indique d’abord un leadership clairvoyant, une intention de solidarité qui transcende les clivages Nord/Sud ou Est/Ouest en plaçant l’Afrique au cœur de ses priorités face à la réalité d’une menace d’effondrement et enfin, elle signale un engagement que l’on peut aisément qualifier d’historique. Quant à la teneur du message porté par ces prestigieux signataires, elle repose sur une analyse du contexte sanitaire, politique, économique et financier international dont les ressorts s’inscrivent dans le sillage des réflexions qui sous-tendent les travaux qui se déroulent actuellement à l’OMS, à l’OMC, au sein des institutions financières internationales et que le récent Sommet sur le financement des économies africaines a permis d’enrichir par une focalisation sur cette idée d’un « New Deal pour l’Afrique ». Je rappelle qu’historiquement, l’expression « New Deal » est le nom qui avait été donné à la politique mise en place aux Etats-Unis dans les années 1930 par le président Franklin Delano Roosevelt pour sortir de la grande dépression engendrée par la crise de 1929. Cette notion est donc toujours associée, d’une part, à une ambition politique et économique très forte et, d’autre part, elle est convoquée quand il y a une forte vulnérabilité et que de graves périls menacent les communautés humaines. Cette tribune, qui intervient dans un contexte international particulièrement difficile où l’Afrique doit inventer de nouveaux mécanismes de résilience, remet en perspective « la nécessité d’assurer un accès universel aux vaccins contre la Covid-19, y compris par la production en Afrique, de renforcer les positions et les rôles des institutions panafricaines dans le cadre d’une nouvelle architecture financière internationale, de relancer les investissements publics et privés et de soutenir le financement à grande échelle du secteur privé africain ». 
A qui est destinée cette correspondance dans un contexte sanitaire qui n’épargne aucun Etat ?
La crise sanitaire actuelle n’épargne en effet aucun Etat, mais il est constant que l’intensité de ses conséquences varie d’un contexte à l’autre, d’un Etat à l’autre. A ce propos, les économies développées disposent d’une plus grande marge de manœuvre pour rebondir. Cette tribune s’adresse à notre sens particulièrement aux pays développés, principaux bailleurs de fonds des pays africains et aux institutions financières internationales qui régissent les flux internationaux de capitaux. Mais elle est également destinée aux acteurs politiques et institutionnels africains qui doivent être conscients des nouveaux enjeux, et se préparer à jouer un rôle actif et responsable dans ce nouveau partenariat appelé de tous les vœux, afin de relever durablement le continent africain.
Cette tribune constitue également une interpellation pour les acteurs du secteur privé africain en particulier. Il m’a semblé que c’est une de ses innovations les plus significatives qui ne doit pas passer inaperçue. Tout l’écosystème entrepreneurial africain, dans toute sa diversité est appelée à s’approprier l’opportunité que représente ce nouveau volontarisme politique et économique pour se projeter avec plus d’audace vers la réalisation de toutes ses potentialités et œuvrer ainsi à réduire le chômage
L’Afrique est au cœur de cette tribune, mais on constate néanmoins qu’elle n’est pas la seule à faire face aux conséquences de la pandémie. Pourquoi ?
L’Afrique a certes été moins touchée que le reste du monde par la pandémie du covid-19 mais uniquement du point de vue du bilan en termes de morbidité et de létalité. Pour le reste, il apparaît nettement qu’elle subit de plein fouet les conséquences économiques et financières de la crise sanitaire comme en témoigne l’entrée en récession globale du continent pour la première fois depuis près de 25 ans. Ceci s’explique globalement par le caractère fortement extraverti de l’économie africaine, qui reste très dépendante des échanges avec le reste du monde avec de fortes exportations de matières premières et importations de produits manufacturés. Les raisons pour lesquelles cette tribune se concentre sur l’Afrique sont explicitées de façon transparente par les signataires. Je voudrais d’abord souligner la conscience accrue d’une forte interdépendance à l’échelle internationale. Dans cette logique, les pays riches comprennent bien que les conséquences de la pandémie de la Covid-19 pourraient durablement éroder le statut de relais de la croissance mondiale à l’horizon des années 2050/2060 que le continent africain était en train de conquérir progressivement depuis deux décennies. 
En quoi une rencontre comme le Sommet de Paris du 18 mai 2021 peut-elle être d’un apport important dans cette recherche de solutions à la relance du continent ?
Le Sommet de Paris s’inscrit dans une logique de diplomatie multilatérale à laquelle le Cameroun est fortement attaché. Le président de la République, Paul Biya, a plusieurs fois réaffirmé la nécessité d’une réponse commune aux probl&egrav...

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