« L’administration fiscale poursuivra son plan de réformes »

Maximilien Nomo, Point Focal Doing Business à la Direction générale des impôts.

La publication du rapport Doing business, qui classait les pays en fonction de l’attractivité de leur environnement des affaires, est définitivement arrêtée. Les services fiscaux avaient questionné la méthodologie aboutissant à ces classements, notamment sur le volet paiement des impôts et taxes, finalement vos observations se confirment avec ce dénouement...
Au-delà de l’indicateur « paiement des impôts » auquel vous faites allusion, il s’agit en réalité d’un constat général de la part de bon nombre d’observateurs. C’est en effet un secret de polichinelle que les scores attribués à certains pays dans le classement Doing Business paraissaient parfois en déphasage avec les progrès observés. En ce qui concerne le Cameroun et plus spécifiquement le volet « paiement des impôts », il est important de relever qu’en dépit des nombreuses réformes mises en œuvre, notre pays est resté l’un des moins performants, en termes de compétitivité fiscale, occupant pratiquement le 181e rang sur 190 économies au cours de quatre années consécutives. Selon la Banque Mondiale, les performances du Cameroun s’expliqueraient notamment par un taux d’imposition des bénéfices des entreprises jugé élevé (57,7%), un nombre d’heures élevé consacré en moyenne sur une année par les entreprises pour l’accomplissement des démarches fiscales (624 heures) et un nombre de paiements à effectuer par an jugé exorbitant (44). Il est tout à fait incompréhensible que de nombreuses avancées opérées sur la même période par l’administration fiscale camerounaise en relation avec certaines de ces récriminations n’aient pas été prises en compte. J’évoquerais à cet égard, sans être exhaustif, la baisse de cinq  points du taux de  l’impôt sur les sociétés, qui est passé de 35% à 30%, la dématérialisation des procédures fiscales et de la délivrance en ligne des documents fiscaux depuis 2017, l’amélioration du remboursement des crédits de TVA à travers la mise en place d’un compte séquestre et le remboursement automatique sans contrôle préalable des crédits de TVA au profit des entreprises citoyennes et la consécration du principe d’une seule intervention des services fiscaux par an au sein des entreprises à l’occasion des opérations de contrôle fiscal, sans oublier la densification de notre réseau de conventions fiscales. Cette incompréhension était d’autant plus forte que la DGI camerounaise avait des éléments de comparaison des pratiques dans de nombreux autres pays et nous avons été toujours convaincus que nous n’avions pas à rougir de nos performances, et que nous pouvions même soutenir la comparaison avec des pays cités en modèle, surtout en ce qui concerne la digitalisation des opérations fiscales. 

Un économiste faisait observer que le Doing Business avait fini par conduire les Etats à accorder "la priorité à la création d'environnements à faible fiscalité et à faible rendement, parfois au détriment de considérations macro-économiques". Est-ce vraiment la solution pour une amélioration du climat des affaires?
Avec cette approche d’évaluation des réglementations fiscales, la tentation n’était pas uniquement d’accorder plus d’attention à des mesures d’allègement de la charge fiscale des entreprises au détriment de la viabilité des finances publiques, mais également de mettre en place des mesures fiscales non conformes aux attentes réelles du secteur privé. Je voudrais préciser d’emblée que la fiscalité n’est pas le seul facteur déterminant de l’investissement. Plusieurs autres facteurs influencent bien avant la fiscalité la décision de l’investisseur. Il en est ainsi de la stabilité économique et sociale, de la taille du marché, de la qualité des infrastructures, de l’offre énergétique, de la disponibilité de la main d’œuvre qualifiée et des risques de change, pour ne citer que ceux-là. De ce point de vue, les attentes du secteur privé vis-à-vis de l’administration fiscale visent plus la simplification des procédures que la diminution de la charge fiscale en soi. Il convient ensuite de relever qu’en ce qui concerne le Cameroun, le niveau de pression fiscale, qui mesure le poids des prélèvements obligatoires sur le Produit Intérieur Brut (PIB), demeure perfectible, les entreprises faisant souvent l’amalgame entre leurs impôts propres et ceux dont elles sont simplement redevables légaux.   

Les pays avaient quand même une certaine pression par rapport à ce classement qui donnait la température du climat des affaires dans le monde. Est-ce que l'arrêt de la publication du Doing business ne va pas faire tomber la fièvre réformatrice dans les différents pays notamment le Cameroun?
Sans aucun doute, l’idée en soi d’une classification des pays selon un indice de la facilité de faire les affaires est louable, encore faudrait-il qu’une telle classification repose sur des critères objectifs ainsi que sur une méthodologie rigoureuse. Il est tout à fait regrettable que les résultats escomptés de cette publication aussi bien des pouvoirs publics que de la communauté des affaires n’aient pas été obtenus, au regard des irrégularités évoquées plus haut. En revanche, la suspension de la publication du rapport Doing Business ne mettra pas un terme aux efforts d’amélioration du climat des affaires. C’est le lieu de rappeler qu’en ce qui concerne notre pays en particulier, l’amélioration de l’environnement des affaires est l’un des axes majeurs de la politique budgétaire dont les orientations sont fixées par le président de la République. Bien plus, la problématique de l’am&eacut...

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