Régulation des médias: le CNC continuera à faire son travail.

Faudra-t-il désormais vouer aux gémonies les plaintes que des Camerounais, usant de leurs droits, adressent au Conseil National de la Communication (CNC), pour dénoncer des errements professionnels de nature à porter atteinte à leur honneur et à leur réputation à travers les organes d’information de masse ? Devra-t-on relativiser la fonction de veille, le devoir d’assainissement et le pouvoir de régulation  du CNC, autorité administrative indépendante née de la volonté conjuguée du législateur et de l’exécutif ?
Cette double interrogation, à l’entame de mon propos, fait suite aux vives réactions notées au sein de certains médias, consécutivement aux dernières sanctions du Conseil National de la Communication, rendues publiques le 6 décembre 2016 et concernant vingt-quatre (24) organes et journalistes à des titres divers. D’aucuns ont préconisé le boycott. D’autres ont annoncé la saisine des tribunaux compétents pour exercer des recours. D’autres encore ont promis de ne jamais exécuter les décisions du CNC.
Dans le flot des réactions, l’on aura tout de même noté quelques propos positifs. A l’opposé de certains journalistes syndiqués ou non, qui ont réclamé l’éviction du CNC et son remplacement par un organe d’autorégulation, bon nombre d’organes ont, de bonne foi, reconnu la justesse des sanctions du Conseil, bien que suggérant à l’avenir plus de sensibilisation avant la condamnation. Dans le même esprit, quelques internautes, flétrissant le laisser-aller qui règne dans l’univers médiatique national, ont acclamé les « actions de salubrité » du CNC.
Des jours durant, le public a ainsi eu droit à un véritable fourmillement idéel, qui allait jusqu’à questionner l’essence et l’existence même du Conseil National de la Communication, institution pourtant créée par la loi N°90/052/du 19 décembre 1990 relative à la liberté de la communication sociale, puis successivement organisée par les décrets N° 91/987 du 21 juin 1991 et N°2012/038 du 23 janvier 2012.
De ce dernier décret, qui porte réorganisation du CNC, deux dispositions majeures méritent d’être rappelées :
En effet, l’article 4 (1) du décret susvisé dispose que « le Conseil veille par ses décisions et avis au respect des lois et règlements en matière de communication sociale ; au respect de l’éthique et de la déontologie professionnelles… ».
L’article 6 (1) du même décret indique par ailleurs que « le Conseil peut donner des avertissements et/ou infliger des sanctions motivées à l’encontre des opérateurs publics et privés, ainsi que des professionnels du secteur de la communication sociale ». Il s’agit, aux termes de l’alinéa 2 de cet article, de la suspension temporaire d’activités pour une période n’excédant pas six (06) mois, ou de l’interdiction définitive d’activités.
A la suite de ce rappel succinct, trois observations s’imposent :
Premièrement, les vingt-quatre (24) décisions rendues par le CNC l’ont été à la suite de plaintes en bonne et due forme, adressées au Conseil par des citoyens camerounais et des personnes de nationalité étrangère vivant dans notre pays dont l’honneur a été bafoué. Le CNC ne s’est autosaisi en aucun de ces cas, bien que la réglementation en vigueur lui reconnaisse le pouvoir de se saisir d’autorité après constat régulier de cas de dérives médiatiques.
Deuxièmement, s’agissant des sanctions motivées prises par le CNC au terme de l’examen de ces plaintes, elles sont basées sur des cas d’atteintes incontestables à l’éthique et à la déontologie professionnelles.
Troisièmement, le CNC a agi dans la stricte limite des pouvoirs que lui confère la réglementation en vigueur. Il n’a fait que son devoir, tout son devoir et rien que son devoir.
Au demeurant, le fait que certains individus se répandent en conjectures au sujet de vices de forme supposés ou réels relève de leur droit légitime, même s’il est souhaitable dans le cadre d’un débat républicain respectueux des opinions des uns et des autres, que les positions défendues s’appuient sur des arguments de fond probants et non sur des dérives langagières à l’encontre des personnes ou des institutions publiques. Cette précision est d’autant plus importante que le pouvoir du CNC est bien encadré par les dispositions de l’Article 6 (3) du décret sus évoqué du 23 janvier 2012 qui mentionne que les sanctions du Conseil « sont susceptibles de recours dans les conditions et selon les modalités fixées par les lois et règlements en vigueur ».
En effet, lorsqu’un professionnel ou un promoteur des médias se bombe le torse en proclament « je suis républicain, … je soutiens le président de la République », l’on est en droit d’attendre de lui une démarche précisément républicaine. Pour y parvenir, l’exercice des recours appropriés face à des mesures  contestées d’une autorité publique devrait se substituer aux attitudes de rébellion et aux déclarations incendiaires, vainement populistes, allant jusqu’à qualifier de « machin » et de « truc » une haute institution mise en place par celui-là même qu’on dit soutenir …, du bout des lèvres.

96 décisions pour 300 plaintes
Un procès, ça ne se gagne ni dans la rue, ni à travers les médias, mais bel et bien devant la barre, face au juge. A ce titre, contrairement à une opinion généralement répandue, le CNC a rendu et ce depuis sa réorganisation en 2012, sur trois cents (300) plaintes reçues,  un peu plus de quatre-vingt-dix (90) décisions, dont treize seulement ont fait l’objet de divers recours. A ce jour, cinq (05) de ces procédures ont abouti, dont trois (03) en faveur du CNC et deux (02) en sa défaveur dans deux cas concernant la chaîne de télévision dénommée « Vision 4 ».
Ces quelques éléments statistiques suffisent à démontrer quatre (04) réalités :
16, 25% des décisions rendues par le CNC ont fait l’objet de recours devant les tribunaux ;
60% des procédures parvenues à terme le sont en faveur du Conseil ;
Les sanctions du CNC sont dans une large proportion appliquées de bonne foi ou avec le concours des autorités administratives compétentes ;
A en juger par le nombre croissant des plaintes en provenance des citoyens, les Camerounais font de plus en plus confiance au CNC pour le règlement des cas d’atteinte à l’éthique et à la déontologie professionnelles en matière de communication sociale.
D’autres données statistiques méritent d’être connues du public, se rapportant à l’ensemble des décisions prises par le CNC entre 2013 et 2016 :
Trente-deux (32) de ces décisions ont concerné des organes de presse écrite, sept (07) ont porté sur des stations de radiodiffusion et cinq (05) ont épinglé des chaînes de télévisions ;
Trente-cinq (35) autres ont directement touché des journalistes de la presse écrite, dix (10) des journalistes de la télévision et sept (7) des journalistes de radiodiffusion.
En poussant l’analyse un peu plus loin, l’on s’aperçoit qu’il y a en presse écrite une dizaine de journalistes officiant dans les mêmes organes, qui portent le flambeau de l’indiscipline éthique et déontologique. Au renfort de cette observation, il y a lieu d’ajouter que le nom de chacun de ces journalistes revient au moins trois (03) fois dans l’ensemble des décisions prises en quatre (04) ans par le CNC. Le même constat est valable pour trois (03) journalistes travaillant dans la même chaîne de télévision, que nous nous gardons de citer nommément, pour une question de courtoisie.
En définitive, c’est une minorité d’organes et de professionnels du secteur des médias qui est régulièrement rattrapée par le CNC pour des fautes tenant généralement du b-a-ba du jou...

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