« A l’Afrique de choisir les modalités de sa sécurité »

Joseph Vincent Ntuda Ebodé, professeur titulaire des universités hors échelle, directeur du Centre de recherche d’études politiques et stratégiques de l’Université de Yaoundé II-Soa.

Lors du 8e Forum de Dakar sur la paix et la sécurité, Macky Sall, président du Sénégal et président en exercice de l’Union africaine a plaidé en faveur de la souveraineté de l’Afrique en la matière. Le continent est-il capable de relever ce défi ?
La sécurité (à ne pas confondre avec la défense qui est un des moyens pour la garantir), qu'elle soit étatique ou globale est une prérogative de l 'Etat sur son territoire qui choisit les voies et moyens de l'assurer et de la garantir. Un État peut donc choisir d'assurer sa sécurité seul sur son territoire ou, de le faire permanemment ou conjoncturellement, en mutualisant ses capacités au moyen des coalitions ou des alliances avec d'autres États. En dehors de la garantie de la sécurité nationale ou collective par les alliances, les États peuvent aussi recourir dans leur voisinage immédiat à l’établissement des mesures de confiance. Dès lors, plaider pour une souveraineté africaine en matière de sécurité, loin de signifier que le continent doit, en son sein tout faire et tout seul, revient plutôt à affirmer que c'est à l'Afrique même qu'il revient de choisir les modalités de sa sécurité, les moyens pour y parvenir et ses partenaires dans ce domaine. Compris dans ce sens, il ne fait point de doute que l'Afrique peut et doit d’ailleurs s'assumer en matière de sécurité. En fait, de 100 millions d'habitants en 1900, la population africaine est passée à 275 millions dans les années 1950-1960, puis à 640 millions en 1990 et à 1,4 milliard en 2022; soit 18 % de la population mondiale. Ce continent qui couvre 6 % de la surface de la terre, 20 % de la surface des terres émergées, pour une superficie de 30 415 873 km2; a, avec ses 55 Etats, la posture géopolitique, la densité politique et la masse critique nécessaire pour s'assumer en matière de sécurité.
Pourquoi jusqu’ici l’Afrique n’arrive-t-elle pas à sortir de la dépendance pour pouvoir s’assumer ? 
La réponse à cette question peut paraître complexe. Principalement parce qu'elle porte à la fois sur le dispositif des unités étatiques et sur l'architecture continentale de paix et de sécurité. Les raisons peuvent varier d'une structure à l'autre... Pour ce qui concerne les États par exemple, il serait honnête de dire que tous ne sont pas logés à la même enseigne. L'Afrique du Sud et les États du Maghreb par exemple, ont des postures différentes de celle des autres États du continent. Donc, la dépendance n'est pas identique d'un pays à l'autre; principalement, en raison des variables politiques, économiques, culturelles, géopolitiques et stratégiques, lesquelles peuvent expliquer soit les avancées chez certains, soit les retards chez d'autres. Pour ce qui est du retard dans la mise en œuvre des capacités panafricaines, cela s'explique par des contraintes internes et externes. Sur le plan interne, limitons-nous aux rivalités entre Communautés économiques régionales (CER) qui portent sur les brigades régionales, et aux rivalités toujours vivaces entre États. Par ailleurs et toujours sur le plan interne, il ne fait aucun doute qu'il existe un problème de niveau d'hiérarchie entre les instances centrales panafricaines et les communautés économiques régionales. Sur le plan externe, on peut mentionner principalement les questions de financement, de formation et d'inter-opérationnalité technologique comme freins majeurs à la mise en œuvre complète de la force en attente.
L’une des causes de l’éche...

Reactions

Commentaires

    List is empty.

Laissez un Commentaire

De la meme catégorie