« Des intérêts divergents conduisent au désordre »

Pascal Mani, administrateur civil principal hors-échelle, ancien gouverneur de région, écrivain.

Pourquoi la désignation des chefs traditionnels fait-elle de plus en plus l'objet de contestations, alors même que les règles concourant à leur choix sont connues ?
Le phénomène de contestation ne date pas d'aujourd'hui. Rappelez-vous un cas célèbre qui a alimenté la jurisprudence camerounaise il y a plus de 30 ans, la chefferie Banka, dans la région de l'Ouest. Toutefois, avec le développement fulgurant des technologies de l’informations et de la communication, tout fait social est de nos jours amplifié. En plus, les chefs traditionnels ont désormais des revenus financiers stables depuis 2013. Ceux qui contestent ont certainement plusieurs raisons. On peut y déceler : la mauvaise foi des candidats, l'implication des non-notables aux consultations, l'intempérance de certaines autorités publiques dans la conduite des consultations, le non-respect des règles coutumières en la matière, l'amateurisme de certaines autorités préfectorales, l'intrusion de certaines élites sans qualité dans le processus, les interférences politiques, etc.

Ces contestations suffisent-elles pour justifier le fait que plusieurs chefferies soient aujourd'hui sans chef ?
Oui, plusieurs chefferies sont vacantes mais elles ne sont pas les plus nombreuses. Je rappelle que le Cameroun compte 78 chefferies de 1er degré, 867 chefferies de 2e degré à travers les 58 départements et une innombrable quantité de chefs de 3e degré. Malgré l'encadrement juridique du processus, notamment le décret présidentiel de 1977 portant organisation des chefferies traditionnelles au Cameroun, les intérêts divergents des acteurs conduisent au désordre.

Comment comprendre la convoitise autour de la chefferie traditionnelle, cause d'agitation et de contestation dans la désignation des chefs aujourd’hui ?
La chefferie attire parce que les humains aiment le pouvoir, fut-il traditionnel, peut-être à cause des honneurs qui y sont attachés, ou des avantages matériels y relatifs. Ce n'est pas la convoitise de la chefferie qui crée la pagaille, mais la mauvaise implication des élites et l'incapacité des autorités à contrôler le processus. En termes d'avantages matériels ou financiers, le décret présidentiel No 2013/332 du 13 septembre 2013 modifiant certaines dispositions du décret de 1977 portant organisation des chefferies traditionnelles a accordé des allocations mensuelles non cumulables, avec tout autre traitement public aux chefs traditionnels : chef traditionnel de 1er degré : 200 000 F, de 2e degré : 100 000 F, de 3e degré : 50 000 F. Au-delà des avantages informe...

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