« Le RDPC doit être prêt pour les batailles futures »

Pr Alphonse Amougou Mbarga, maître de conférences en science politique, Université de Douala.

Le RDPC, qui célèbre son 38e anniversaire ce vendredi, est le vainqueur des Sénatoriales du mars dernier. Qu’est-ce qui explique, selon vous, l’hégémonie de ce parti sur la scène politique depuis sa création ?
Pour cette hégémonie, faut tenir compte de plusieurs éléments. L’assise territoriale du parti unique a aidé à consolider le RDPC. Car, lorsque l’on parle de 38 ans, il faut tenir compte de la période avant la concurrence politique liée au retour au multipartisme. L’article premier des statuts du RDPC dispose que « le parti qui s’appelait UNC (Union Nationale Camerounaise) prend à compter de ce jour (le 24 mars 1985, ndlr) la dénomination de Rassemblement démocratique du peuple camerounais ». Il s’agissait d’une mutation politique interne à l’époque du parti unique. Cette mutation s’est accompagnée en 1988 d’élections pluralistes à l’intérieur. Et contrairement à d’autres partis politiques africains de l’époque du monopartisme, le RDPC n’a pas implosé en factions malgré le départ de certains barons du système pour former d’autres partis politiques au moment de l’ouverture démocratique des années 1990.
Le maillage de l’espace politique permet par ailleurs au RDPC d’être aujourd’hui le seul parti présent sur l’ensemble du territoire comme en témoigne le renouvellement de son sommier politique en 2022. Par conséquent, au regard du mode de scrutin des élections sénatoriales, l’on comprend aisément qu’il soit donné vainqueur. En effet, le collège électoral comprend les conseillers municipaux et les conseillers régionaux qui (sur l’ensemble du territoire) sont majoritairement du RDPC.
Dans cette perspective, il faut aussi relever le génie politique du président national de ce parti qui a su composer avec les forces politiques, les élites économiques et traditionnelles. De plus, l’incapacité de l’opposition à faire son aggiornamento joue régulièrement et de plus en plus en sa faveur. En effet, l’on peut observer que les partis politiques ne se remettent jamais en cause après les élections pour comprendre leur propre échec et se réfugient derrière des slogans qui finissent par lasser les électeurs.

Le parti a su résister aux multiples chocs internes qu’il a connus, avec, parfois, la démission de certains cadres. Mais on n’a pas l’impression que cela l’ait fragilisé comme dans d’autres formations politiques. Comment est-ce possible ?
Les démissions et les factions sont des réalités de la vie d’un parti politique. Un citoyen qui ne se reconnaît plus dans un appareil politique ou qui estime ne pas avoir la place qu’il mérite est libre de démissionner. La question la plus importante se trouve au niveau de la mobilisation des ressources ( le poids politique réel du démissionnaire) et des adversaires politiques (la perception qu’ils ont du démissionnaire et la place qu’ il faut lui accorder). En réalité, la démission d’un seul militant ne suffit pas à ébranler un parti politique, si celle-ci ne s’accompagne pas d’une masse critique des électeurs dans un fief politique. Il faut tenir compte du poids politique réel d’un démissionnaire dans la vie politique du parti politique. À ce titre, le RDPC a rarement connu des démissions de personnalités ayant une véritable emprise. Les départs au moment de la libéralisation politique faisaient partie de l’ambiance du moment dans la mesure où plusieurs personnes pariaient sur l’effondrement des anciens partis uniques. D’ailleurs, il faut rappeler à l’époque cette expression du président Paul Biya qui parlait de « virginité politique » pour désigner certains tenants du système. 
Par contre, certains chocs et querelles observés lors du renouvellement de so...

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