Diversification de l’économie : les prérequis

Il est toujours bon de savoir ce que les observateurs pensent de l’action que mènent les autorités pour redresser l’économie camerounaise qui révèle ses fragilités à chaque fois que les chocs exogènes se produisent. Car les regards extérieurs peuvent soit rassurer ceux qui sont dans le feu de l’action, soit les amener à se remettre en cause pour réaliser une croissance plus forte, plus durable et plus inclusive. C’est vrai que la conjoncture mondiale est difficile mais il est certain que les performances locales sont insuffisantes, avec un taux de croissance du PIB réel estimé à 3,4 % en 2022, projeté à 4,3 % en 2023 puis en moyenne à 4,5 % à moyen terme, d’après le Fonds monétaire international (FMI). Autrement dit, il faut trouver les voies et moyens de mettre plus de gaz dans les réacteurs afin de faire décoller la machine. D’autant que les nombreuses ressources naturelles dont dispose le pays permettent de faire mieux.                          
Dans cette optique, la Déclaration publiée le 17 mars dernier par Kenji Okamura, directeur général adjoint (DGA) du FMI, à l’issue des réunions tenues les 15 et 16 mars 2023 avec les autorités du Cameroun et de la CEMAC, suscite un intérêt particulier. En substance, l’hôte du Cameroun livre sa vision des opportunités et des difficultés auxquelles le pays est confronté, avant de suggérer des pistes de réformes et d’actions.                                                                                                                                                  
D’entrée de jeu, Kenji Okamura relève qu’en dépit d’un contexte macroéconomique contraignant, les autorités camerounaises ont poursuivi la mise en œuvre de leur programme visant à maintenir la stabilité et promouvoir la croissance. Evoquant le programme de développement du gouvernement et plus largement, les défis économiques qui ont meublé les échanges pendant son séjour au Cameroun, il souligne que deux priorités ont émergé.                           
Le DGA du FMI estime d’abord qu’il est indispensable de promouvoir une croissance inclusive et résiliente en favorisant une économie diversifiée tournée vers les exportations de produits non pétroliers. Une économie diversifiée étant essentielle pour permettre à la croissance d’être mieux protégée des chocs sur les matières premières et d’être plus résiliente à long terme. Pour améliorer le bien-être de la population camerounaise dans son ensemble, la croissance, soutient-il, doit bénéficier à tous. D’où l’importance des réformes structurelles qu’il suggère pour améliorer le climat des affaires et renforcer l’inclusion financière, la gouvernance et la lutte contre la corruption. A son avis, ce sont ces réformes qui permettront de libérer le potentiel de croissance du pays et, surtout, de faire du secteur privé son premier moteur de croissance.                                                                                                                                              
La deuxième priorité concerne les pistes d’actions que le gouvernement peut mettre en œuvre pour dégager davantage d’espace budgétaire afin de financer des dépenses prioritaires, comme les infrastructures productives, la santé et l’éducation. C’est ainsi que Kenji Okamura propose de mettre en œuvre des réformes visant à stimuler les recettes budgétaires et les exportations, par exemple en élargissant la base d’imposition du secteur informel et en améliorant l’efficience des dépenses publiques ; donner la priorité aux dépenses productives, comme les grands projets d’infrastructures ; s’appuyer sur des prêts à plus long terme et à des conditions préférentielles.                                                                                                                          
S’adressant dans un deuxième temps, non plus seulement au Cameroun, mais à l’ensemble des pays de la CEMAC, le DGA du FMI pense que pour garantir une économie diversifiée, il est important de continuer de renforcer le capital humain grâce à l’éducation et des emplois valorisants. Il faut aussi concrétiser les immenses possibilités commerciales au sein de la sous-région, en réduisant les obstacles au commerce ; en accélérant le développement du secteur financier car en veillant à ce qu’il soit ouvert au plus grand nombre, ce secteur contribuerait grandement à élargir l’intermédiation financière et à soutenir l’activité des entreprises.                                                                                                                                                
De tout ce qui précède, on peut retenir deux orientations stratégiques majeures que les autorités camerounaises ne découvrent d’ailleurs pas, puisque les suggestions formulées les confortent davantage dans la justesse du modèle mis en œuvre depuis 2021 à travers la politique de l’import-substitution. Il s’agit maintenant de bâtir sans délais une économie plus diversifiée tournée vers les exportations de produits transformés. Cela permettra d’élargir les sources et les bases de la croissance pour mieux résister en cas d’effondrement des cours mondiaux des matières premières. Cette mutation ne se fera pas par un coup de baguette magique. En d’autres termes, il y a des prérequis qui conditionnent la réussite de la transformation à grande échelle de nos matières premières pour n’exporter désormais que des produits finis à forte valeur ajoutée, capables de rivaliser avec ceux déjà mis sur le marché par nos concurrents. Le premier problème à résoudre, c’est de rattraper le grand retar...

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