« C’est tout, sauf pour l’intérêt de la réconciliation »

Sylvain N’Guessan, politologue, directeur de l’Institut de stratégie d’Abidjan.

On observe en ce moment de grandes manœuvres politiques en Côte d’Ivoire à travers des alliances. Au-delà du jeu politique, ces regroupements peuvent-ils faire redouter une menace sociale lors des prochaines échéances politiques ?
Comme vous l’avez si bien dit, le jeu d’alliances est en train de battre son plein en Côte d’Ivoire. D’un côté, le PDCI de Henri Konan Bédié et le PPA-CI de Laurent Gbagbo ; de l’autre côté, le RHDP d’Alassane Ouattara essaie d’attirer vers lui les partis comme le FPI de Pascal Affi N’Guessan, le MFA et j’en passe. On dirait que c’est la nuit des longs couteaux au niveau de ces partis-là. Dans ce jeu politique, il y a une sorte de crispation au niveau de rejet de la candidature de Laurent Gbagbo qui a été retiré de la liste électorale. Il n’y a pas que lui, puisqu’il faut citer Charles Blé Goudé, Guillaume Soro, ceci pour des questions de droit.  Comment le PPA-CI a-t-il appréhendé cela ? Comment son allié PDCI appréhende-t-il cela ? Idem pour le GPS dissout de Soro Guillaume. Il pourrait avoir des réactions au niveau de la rue, des marches, des protestations, etc. Très peu habitué à ce genre de schéma, comment le régime Ouattara va-t-il réagir ? Depuis 2011, en dehors de la parenthèse de 2020, il n’y a plus eu de contestations en tant que telles. On sait comment ces choses se passent en Afrique de l’Ouest. Regardez le Sénégal en ce moment… La Côte d’Ivoire en a été un laboratoire en 2002 et 2011 à travers des marches. Il y a eu de bruyantes agitations au Togo et au Bénin. On sait comment les choses se passent sur ces questions-là. La rue pourrait donc reprendre du service.  Le cas échéant, comment les institutions en place pourraient-elles répondre à ces manifestations ? Comment les forces de défense et de sécurité seront-elles déployées ? L’inconnu se trouve dans ces questionnements.

Quelles sont les chances de succès de ces idylles contre-nature ?
Quand on interroge l’histoire de la Côte d’Ivoire, on a déjà vu des alliances de ce genre autour des années 1995 entre le FPI alors dirigé par Laurent Gbagbo et le Rassemblement des républicains de Alassane Ouattara. Par la suite il y a eu l’alliance FPI-PDCI (Gbagbo-Bédié) quand Laurent Gbagbo est arrivé au pouvoir. Aujourd’hui, c’est l’alliance entre le PPA-CI et le PDCI et le RHDP et le FPI. Une chose est sûre, il n’y a aucun fondement idéologique. Ce sont des leaders, qui, à un moment crucial de la vie politique, cherchent à arrondir les angles pour susciter une masse au niveau de l’électorat afin de faire tomber celui qui est au pouvoir. C’est cela, les trois cavaliers de la Côte d’Ivoire. Deux s’unissent pour faire tomber celui qui est au pouvoir. Quand celui qui est au pouvoir tombe, le vainqueur suscite une rupture avec les deux autres. Je pense que le PDCI et le PPA-CI sont tombés d’accord sur beaucoup de points : sur les élections locales, les listes communes, etc. jusqu’à la présidentielle. Si le RHDP l’emporte au premier tour, tant mieux, mais s’il y a un second tour, tout pourra se jouer à ce niveau avec le jeu de regroupement. Exactement comme en novembre 2010. A ce moment, on verra alors comment le gâteau sera partagé. Mais généralement la rupture survient. Mais, on en est pas encore là. On verra bien.

Le prétexte est celui de donner toutes les chances à la réconciliation. Même si ces concepts ne sont pas nouveaux, quelle part de sincérité peut contenir ce discours ?
C’est tout sauf pour l’intérêt de la réconciliation. C’est une affaire de conquête du pouvoir et du fauteuil présidentiel. Le fauteuil présidentiel n’est pas un banc qui peut prendre trois personnes. C’est une place ! Le PDCI et le PPA-CI vont renforcer leurs liens en vue du fauteuil en 2025. C’est v...

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