« Il faudrait un véritable partenariat public-privé »

René Yatcho Nyaben, économiste.

Le ministre du Commerce a lancé le 24 avril 2023 une opération spéciale gel de prix pour certains produits phares dans les grandes surfaces. Est-ce la solution appropriée pour lutter contre la vie chère ?
C’est, dans tous les cas, une des solutions car le gel des prix peut, à court terme, aider à juguler l’inflation, préserver le pouvoir d’achat et limiter les mouvements sociaux. En ce sens, la mesure dont certains pans sont politiques, n’est pas irrationnelle même si elle présente le danger de créer des effets d’aubaine pour les consommateurs à hauts revenus. L’on peut ainsi admettre, toute proportion gardée, que dans quelques cas, le dispositif maintient les prix à la consommation dans des proportions raisonnables. Mais ces proportions sont temporaires en raison des adaptations effectuées par les entrepreneurs économiques sur les différents marchés. Par exemple, si l’on gèle le prix de l’huile, les producteurs vont soit mettre sur le marché des huiles de faible qualité,  soit en produire moins au risque de provoquer des pénuries et des rationnements. Si ces produits sont importés, ces mêmes opérateurs peuvent recourir à d’autres marchés plus rémunérateurs avec des externalités négatives (huile de mauvaise qualité, augmentation des marges bénéficiaires non traçables…). En réalité, l’on ne peut forcer les entreprises à geler leurs prix et, peut-être, vendre à perte. C’est illégal et contreproductif fiscalement. Pour cette raison, les mesures ministérielles évoquées doivent être inscrites dans un cadre holistique de long terme.

Est-ce qu’il ne faut pas tout simplement veiller au respect des prix sur le marché au vu des tendances spéculatives observées ?
Les tendances spéculatives sur le marché existent, mais elles ne sont pas les seules raisons de la hausse des prix. En la circonstance, veiller uniquement au respect des prix pourrait ne servir à rien si les producteurs et les commerçants trouvent les moyens de les élever sans attirer l’attention des autorités compétentes. Pour ce, l’Etat doit s’attacher au principe que les prix sur les marchés s’établissent par les lois de l’offre et de la demande et qu’il joue un rôle de coordination pour les entrepreneurs et les consommateurs. Par exemple, il informe les producteurs sur les produits et services rentables d’une part et les consommateurs sur les nécessités de revoir leur prétention d’achat d’autre part. En s’attachant à ces postulats, il serait facile pour l’Etat de considérer les prix comme des signaux qui indiquent les évolutions sur le marché. Ce faisant, il est à même d’adopter plusieurs attitudes. Selon les situations en présence, il peut s’agir d’un contrôle souple effectué par des agents disposant d’un pouvoir de coercition et de sanction. Mais, cette procédure n’est pas toujours aisée en raison des risques de corruption venant des entreprises formelles et des  difficultés de suivi des acteurs du secteur informel. Il peut aussi s’agir de l’imposition des prix bas (prix plafonds) que les offreurs ne peuvent dépasser. Seulement, l’imposition d’un plafond induit, très souvent, des pénuries des biens et services règlementés. L’on en arrive ainsi à la conclusion qu’en matière de gestion des prix sur les marchés, toute mesure non complétée par des initiatives subsidiaires échoue à terme.

Comment peut-on véritablement intéresser les opérateurs privés à ces opérations du gouvernement ? 
L’intéressement dont vous parlez, passe par un véritable partenariat public-privé. Il s’agit d’un forum d’actio...

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