« Il faut se résoudre à dialoguer »

Dr. Serge Christian Alima Zoa, Internationaliste, Centre de Recherche et d’études politiques et stratégiques (CREPS) de l’université de Yaoundé II-Soa.

Comment comprendre que ces crises se développent sur le continent alors qu’il existe des blocs régionaux créés pour anticiper ou apporter des solutions efficaces et durables ?
L’Afrique indépendante, convaincue des risques ou des effets néfastes des crises sur le développement du continent, n’a cessé de créer, d’inventer et d’imaginer des mécanismes pour les prévenir, les gérer et les régler. Historiquement, ce fut à la faveur de la création de l’OUA en mai 1963, à Addis-Abeba, en Ethiopie, que l’Afrique instaura le principe du « règlement pacifique des différends, par voie de négociations, de médiation, de réconciliation et d’arbitrage ». Au cours de son évolution, cette institution se montra impuissante face à la récurrence des crises interétatiques, manifestes à travers les coups d’Etat (Ghana, 1966 et 1979), les guerres civiles (Nigeria, 1967-1970, Rwanda, 1994) et interétatiques (Cameroun-Nigeria, Ethiopie-Erythrée). S’appuyant sur le Traité d’Abuja (1991), les communautés économiques régionales, une bonne quinzaine (CEDEAO, CEEAC, SADC, COMESA, UMA, CEN-SAD, EAC, IGAD, UEMOA, SACU, CEPGL, UFM, CEMAC, ALG, G5 Sahel) créant subséquemment l’effet « bol de spaghetti » et engluées dans ces crises, ont intégré progressivement le principe «  paix et sécurité » dans leurs objectifs d’intégration. Prenant la relève de l’OUA, l’Union africaine (UA) au cours de sa première conférence au sommet, tenue du 9 au 10 juillet 2002, à Durban en Afrique du Sud se montre plus sensible aux questions de paix et de sécurité, véritables obstacles au développement de l’Afrique. Elle crée à l’échelle continentale, un instrument chargé de la prévention et de la gestion des crises. C’est le Conseil de paix et de sécurité (CPS). Il se présente comme un système de sécurité collective et d’alerte rapide. En dépit des médiations entreprises et du nombre d'agences inter-États habilitées à traiter les questions de sécurité, le nombre, la durée et l'intensité des conflits n'ont  jamais baissé de façon substantielle. L’Afrique demeure en proie à de nombreux fléaux humains et naturels. A l’observation, ce sont les crises liées à la problématique électorale qui enflamment régulièrement l’actualité. La tendance affirmée est que nombre de systèmes électoraux – dont les desseins fondamentaux sont la consolidation de la paix par la légitimation du pouvoir, la sécurisation des communautés déchirées par des conflits, l'aide à la démocratisation des États – se sont transformés, paradoxalement, en modes de production constante de crises : contestation du pouvoir, émeutes, révoltes sociales ; lesquelles dégénèrent généralement en rébellions, séditions, putschs, guerres séparatistes, guerres civiles...  Au fil du temps, plusieurs de ces crises auxquelles se greffent désormais les multiformes du changement climatique sont devenues de véritables révélateurs de l'incapacité des États africains à mobiliser les cadres institutionnels iréniques sur lesquels repose l'architecture africaine de paix et de sécurité. Dans ces conditions, la question de son efficience, fondée sur des compromis régionaux co-construits, se pose avec acuité. 

Une certaine opinion pense que ces blocs sont en panne de solutions...
En réalité, les impasses des mécanismes régionaux de sécurité collective et de régulation des conflits, sont globalement liées à l’absence d’une émergence stratégique, aux fractures politiques régionales, et aux projections stratégiques des puissances africaines elles-mêmes, dans un contexte d’intégration sous-régionale inaboutie. En raison du cycle de crises qui l’a impactée au cours des années 1990, la sous-région Afrique centrale par exemple connait une infructueuse  intégration, parfois ...

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