« Des doutes sur le déroulement pacifique de l’élection »

Dr. Serge Christian Alima Zoa, internationaliste, Centre de recherche et d’études politiques et stratégiques (Creps) de l’Université de Yaoundé II-Soa.

La campagne électorale en cours en vue de la présidentielle du 16 novembre prochain est émaillée d’incidents et est boycottée par 11 des 13 candidats. Faut-il craindre pour la suite du processus ?
Le premier tour de l'élection présidentielle à Madagascar, initialement prévu le 9 novembre 2023, a été reporté d'une semaine par la Haute Cour constitutionnelle (HCC), suite à la blessure au visage par un éclat de grenade lacrymogène du candidat Andry Raobelina, dans le centre de la capitale Antananarivo lors d'une manifestation de l'opposition. Le second tour du scrutin a toutefois été maintenu au 20 décembre 2023. L'élection avec treize aspirants à la fonction suprême, à laquelle le président sortant Andry Rajoelina, est candidat, se prépare depuis plusieurs semaines dans un climat qui ne cesse de se dégrader. La majorité de ceux qui s'opposent à lui dans les urnes, rassemblés dans une alliance de convenance baptisée le « Collectif des onze », ont appelé quasi quotidiennement à manifester depuis le début du mois et dénoncé « un coup d'Etat institutionnel » orchestré par le pouvoir. La HCC avait rejeté trois recours réclamant l'invalidation de la candidature de Rajoelina « pour défaut de nationalité malgache ». La plus haute juridiction de la Grande île de l'Océan indien a par ailleurs désigné un gouvernement collégial d'intérim dirigé par le Premier ministre, Christian Ntsay, un proche de Rajoelina. Conformément à la Constitution en période électorale, le président a cessé d'exercer le pouvoir un mois avant le scrutin. L'intérim devait normalement être assuré par le président du Sénat, qui a cependant décliné pour « raisons personnelles ». Herimanana Razafimahefa a annoncé revenir sur sa décision et avoir fait l'objet de « pressions » pour se retirer. Du coup, les sénateurs rassemblés la semaine dernière en session extraordinaire ont finalement voté à la majorité pour sa destitution et l’élection d’un nouveau président. Malgré la séance de médiation menée par le Conseil œcuménique des églises chrétiennes de Madagascar, les membres du collectif ont annoncé falbalas qu’ils ne se déploieraient pas pour le moment afin de présenter leur profession de foi. Déglinguée, la campagne électorale pour la présidentielle connaît donc un début mouvementé. Le boycott des 11 candidats met en évidence les tensions politiques qui règnent dans le pays et laisse planer le doute sur le déroulement pacifique de l’élection. 

La plus juridiction, la double nationalité malgache et française d’Andry Rajoelina, et l’intérim du président de la République continuent de raviver la polémique. Comment en sortir définitivement pour un scrutin apaisé ? 
La HCC en rejetant les requêtes déposées le 8 septembre dernier par quatre partis, visant à invalider la candidature d’Andry Rajoelina,     a dégagé l’horizon du chef de l’Etat sortant sur le contrôle des institutions jusqu’au scrutin. Depuis la révélation de sa nationalité française, acquise en 2014 par un décret de naturalisation signé par le Premier ministre de l’époque, Manuel Valls, sa capacité à exercer la présidence de Madagascar est en effet contestée. En vertu de l’article 46 de la Constitution, seul un citoyen de nationalité malgache peut se porter candidat, une qualité dont il ne pourrait plus se prévaloir si on se réfère au Code de la nationalité. La HCC s’est gardée relativement à ce barnum de se prononcer sur le fond, mais, en s’appuyant sur sa compétence « en matière de règlement des contentieux » préélectoraux. Elle a écarté les demandes au motif que la loi ne prévoit pas « la possibilité de recours en matière de liste des candidats ». En réalité, le président élu en 2018 a toujours entretenu le flou sur son possible statut de binational, jugé certainement peu flatteur pour l’image du dirigeant messianique et nationaliste qu’il entend incarner. Une volonté illustrée notamment à travers la demande de restitution des îles Eparses, ce chapelet de terres situées dans le canal de Mozambique soustrait par la France, son ancienne colonie au moment de l’indépendance en 1960. Général retraité, Richard Ravalomanana a été élu à l’unanimité par les 15 sénateurs ayant participé au vote, nouveau président du Sénat le 13 octobre 2023. Il succède à Herimanana Razafimahefa, destitué pour mise en cause de sa santé mentale, lors d’une session parlementaire extraordinaire très contestée. L’ancien secrétaire d’Etat charg&eac...

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