« Ces manœuvres revitalisent le jeu politique »

Pr. Aristide Menguele, politologue, université de Douala.

A un peu plus d’un an des prochaines élections, notamment la présidentielle, on observe déjà un certain frémissement au sein des partis politiques. Comment analysez-vous ces manœuvres ?
A l’approche d’une échéance électorale majeure comme la présidentielle, on assiste généralement à de grandes manœuvres qui participent de l’animation de la vie politique. Si elles sont révélatrices de la saisonnalité des activités politiques, elles s’inscrivent par ailleurs dans des logiques plurielles de (re)positionnement et de (re)mobilisation politique. Le frémissement observé est un indicateur des enjeux qui structurent et déterminent les perceptions du jeu électoral chez les acteurs politiques. Le moment électoral est considéré à la fois comme un temps favorable aux logiques de (re)positionnement et une période de révélation politique par la construction des candidatures émergentes. Pour certains, ce qui se joue dans ce frémissement pré-électoral c’est la négociation d’une entrée en politique. Pour d’autres, ce qui est en jeu c’est la consolidation d’une trajectoire ou d’un positionnement dans un champ politique où les luttes pour les positions de pouvoir démobilisent, configurent et reconfigurent indéfiniment les formations politiques qui s’y investissent. Sous ce rapport, loin d’être pathologiques, ces manœuvres participent des activités politiques normales en contexte pré-électoral. Par conséquent, elles revitalisent le jeu politique en donnant à voir et à lire le sens et la puissance que les acteurs donnent à leurs prétentions au pouvoir. 

Le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) s’active actuellement à la base pour les inscriptions sur les listes électorales. Quel est l’intérêt pour le parti au pouvoir d’insister sur ce point précis ?
La concertation permanente avec la base est l’une des forces motrices du parti au pouvoir. Le Rdpc en a fait l’un de ses sacro-saints principes de fonctionnement et de redéploiement. A l’analyse, il apparait que, pour le Rdpc, la base est l’infrastructure sur laquelle se greffe la superstructure de domination politique que représente et incarne cette formation politique. Cette concertation permanente rend possible la communication entre la base et les hautes instances du parti. Sous ce rapport, elle limite les risques d’incompréhensions, renforce la discipline au sein du parti, et consolide la connexion entre la base et le sommet. La force du parti au pouvoir étant sa base militante, cette année dite préélectorale est une opportunité pour le Rdpc qui ne ménage aucun effort pour remobiliser ses troupes en vue des batailles politiques en perspective, mettant ainsi cette base à contribution dans les inscriptions sur les listes électorales, la sensibilisation et, surtout, la formation des militants à l’expression du suffrage. Il s’agit donc d’une mobilisation de conservation du pouvoir.

On note aussi des rapprochements du côté de l’opposition camerounaise. Quelle analyse vous inspire cette démarche ?
Les concertations en cours au sein de l’opposition camerounaise participent d’une volonté de mutualisation des forces. Conscientes du rapport de force défavorable qui compromet durablement leur capacité à conquérir et à conserver le pouvoir tant au niveau local que national, les formations politiques de l’opposition semblent a priori avoir compris qu’individuellement, il leur est impossible de rivaliser avec succès le parti ultra dominant : le Rdpc. Mais, la ritualisation de ces concertations depuis le retour du multipartisme laisse penser qu’il s’agit généralement de grands épisodes de révélations des clivages qui fissurent l’opposition camerounaise. L’expérience camerounaise des concertations au sein de l’opposition donne à voir qu’en général, ces concertations débouchent sur des frac...

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