Commerce de vivres : « Bayam-sellam » à l’attaque

A la fois productrices et commerçantes, plusieurs femmes se lancent à l’assaut des clients avant le lever du jour. Incursion dans cet univers où seules les plus coriaces font des bénéfices.

A 2h du matin, Ndjana a débuté sa navette. Propriétaire d’un minibus, ce quadragénaire s’est donné pour mission de transporter, à partir de minuit, des cultivatrices de l’arrondissement de Batchenga pour les marchés d’Etoudi et du Mfoundi à Yaoundé. De Nalassi à Ndji, en passant par Elon, le chauffeur a ramassé sept passagers en moins d’une heure ce 3 octobre 2020. C’est au tour de Solange Nga Bikoe, habitante de Balong I à 1 km du centre-ville de Batchenga, de prendre la route.

Des klaxons à répétition invitent Solange à retrouver ses trois filets de 100 kg de bâtons de manioc, fraîchement sortis du feu et placés en bordure de route. « Ndjana fait vite pardon ! Mon dos peut se casser. Je suis très mal assise », lance une passagère, agacée par cette attente. A l’intérieur du car de douze places, sept sacs de bâtons de manioc occupent déjà une rangée. Tandis que neuf autres sont dans le coffre arrière. La vapeur qui s’échappe desdits sacs, emplit peu à peu l’atmosphère dans le véhicule. La chaleur monte, la tension également. « Si elle n’est pas prête, partons ! Elle devait nous attendre devant la porte depuis. Moi je veux vendre mes quatre filets de patates avant 6h ! », grommèle une autre passagère en langue locale, l’Eton. Dix minutes plus tard, Solange se présente enfin. Vêtue d’un ensemble jogging enfilé dans des bottes, au-dessus duquel se dresse un long « kaba », elle est prête à affronter la fraîcheur matinale qui règne à partir de 3h. Ndjana et ses deux convoyeurs chargent les trois sacs. Le car compte désormais douze sacs de bâtons de manioc à l’arrière, sept à l’intérieur et neuf filets de patates au-dessus. Il est 4h. Direction, Yaoundé.

La course à la marchandise

Sur 45 km, Ndjana et ses passagers regagnent Yaoundé en 30 minutes. À peine après avoir franchi le carrefour Etoudi, une dizaine de revendeuses se mettent à courir après le car de Batchenga. La fine pluie ne refroidit pas l’enthousiasme des celles-ci. Une fois le véhicule garé, il est pris d’assaut par les poursuivantes. « C’est ma marchandise ! C’est moi qui ai touché le sac en premier ! », lance une commerçante à une autre. « N’est-ce pas c’est sur ta tête ? », rétorque sa rivale en affaires. Les deux femmes se disputent les trois sacs de bâtons de manioc de Solange. A force de se quereller à propos de la marchandise, l’une des deux finit par glisser dans une mare d’eau. Le temps de se relever et vérifier que son « sac d’argent » est toujours en place, sa rivale se fait aider par un pousseur et transporte les trois sacs en un clin d’œil.

L’heure est ensuite à la négociation. Solange laisse le bâton à son « Asso », à 40 F au lieu de 45 F. Sur les 100 Kg comportant 900 bâtons, la revendeuse décide de prendre deux sacs et demi à raison de 90.000 F. Affaire conclue à 5h30.

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