Pr. Christian Zamo Akono : « Il faudra améliorer l’efficacité de l’administration fiscale »

Agrégé d’économie, université de Yaoundé II-Soa.

Après le sommet extraordinaire des chefs d’Etat d’Afrique centrale, à quoi les Camerounais doivent-ils s’attendre en termes d’ajustement structurel interne ?
Avant de répondre à votre question, il convient de rappeler que le sommet des chefs d’Etat de l’Afrique centrale fait suite au ralentissement de l’activité économique observé en 2016 en Afrique subsaharienne en général ; ralentissement principalement attribué à la dégradation de l’environnement extérieur, laquelle a entraîné la forte baisse des cours des produits de base et a eu des effets prononcés sur les agrégats régionaux. S’agissant particulièrement de la zone CEMAC, les taux de croissance du PIB (réel) enregistrés se sont écartés de manière significative de la trajectoire de 5% à laquelle l’on s’est habitué au cours des années antérieures. Un tel constat invitait donc à réfléchir aux ajustements à apporter aux politiques publiques de manière à raviver la croissance. Rappelons également qu’une politique d’ajustement structurel consiste à mettre en place un ensemble de mesures à caractère économique et social sensées conduire au rétablissement des équilibres macroéconomiques. En fonction des contraintes internes propres à chaque pays, différentes mesures peuvent être adoptées. S’agissant particulièrement du Cameroun, l’on devrait s’attendre à la mise en place des mesures visant à contenir le déficit budgétaire que pourrait générer la baisse durable des recettes fiscales issues du secteur pétrolier. De plus, l’on a observé au cours de ces dernières années que les autorités publiques ont beaucoup usé de l’emprunt extérieur pour répondre aux besoins de financement des projets d’infrastructures en cours dans le pays et profiter des conditions financières extérieures favorables. Avec le durcissement progressif desdites conditions d’emprunt, une des recommandations du Fonds monétaire international invite les pays de la CEMAC, non seulement à revoir leurs priorités de dépenses, mais surtout à améliorer la mobilisation des recettes. Dans l’un ou l’autre cas, l’on devrait s’attendre à des mesures visant à accroître la collecte des ressources fiscales. La loi des finances récemment votée comporte des éléments qui vont dans ce sens.
Que faut-il faire pour ne pas revenir aux mesures d’austérité qu’on a connues dans les 1980-1990 ?
Il faut reconnaitre que la situation actuelle est de très loin différente de celle des années 80. Mais qu’à cela ne tienne, il est important de poursuivre la mise en œuvre de la politique de modernisation de l’appareil de production nationale. A ce sujet, il était temps que l’on définisse les projets à finaliser en priorité, quand on sait que tous n’ont pas le même niveau d’impact sur l’activité économique au Cameroun. Par ailleurs, il nous semble important, en poursuivant l’amélioration du climat des affaires, qu’une véritable politique d’accompagnement de l’entreprise privée camerounaise se mette en place. A ce jour, si l’on a du mal à ressentir les effets du « programme manioc » ainsi que d’autres programmes du genre, c’est en partie parce que le ciblage des opérateurs privés n’a pas souvent été bien mené. Cela pose donc, au-delà de l’accompagnement du secteur privé, le problème de la corruption dans le secteur public, laquelle détourne les ressources publiques vers des utilisations autres que celles pour lesquelles elles sont destinées.
Quelles sont les mesures à prendre pour renflouer les caisses de l’Etat en ce moment où les recettes pétrolières ont baissé ?
De manière générale, les autorités publiques doivent poursuivre les efforts qu’elles déploient pour améliorer la mobilisation des recettes publiques, notamment en exploitant le potentiel de recettes supplémentaires qu’offre le secteur non-pétrolier de l’économie camerounaise. Il s’agit principalement d’agir sur l’existant, c’est-à-dire, améliorer l’efficacité de l’administration fiscale, non-seulement en le...