« Les premières compétences sont d’application simple »

Georges Elanga Obam, ministre de la Décentralisation et du Développement local

Monsieur le ministre, quelle lecture faites-vous de la perception de l’évolution de la décentralisation qui est celle du président de la République au soir du 31 décembre 2021 ?
Lors de son message à la Nation le 31 décembre dernier, le président de la République a pris un temps pour évoquer ce qui se fait en ce moment en matière de décentralisation. Ce que j’en ai retenu, c’est que de son point de vue, et que nous partageons pleinement, ce qui se fait en la matière, correspond aux engagements qu’il a pris lors de sa dernière campagne électorale et lors de ses différentes prises de parole pour évoquer le fonctionnement de notre pays. Il avait promis de moderniser l’environnement général de la décentralisation, cela a été fait avec des outils juridiques que tous les acteurs trouvent de bonne qualité. On est parvenu à mettre en place la seconde étape de la décentralisation qui est constituée par les régions. Les élections ont eu lieu et les activités sont désormais conduites par celles-ci. Nous sommes également d’avis avec le chef de l’Etat que cela doit se faire de manière patiente, prudente, dans le sens où notre pays a pris un temps très long pour parfaire son unité. Certains envisagent la décentralisation comme un risque de désarticulation de cette unité, ce qui n’est pas vrai, mais qui pourrait l’être si on s’y prend mal. C’est pour cela que, alors que beaucoup réclamaient que des compétences soient vite transférées, que l’administration soit mise en place, que les moyens soient débloqués, le président de la République souhaite que nous allions à pas mesurés. Que les conseils régionaux soient mis en place, qu’on les voit à l’œuvre dans la perspective de l’élaboration des budgets, des plans régionaux de développement et que l’on voit les coûts que cela induit, de manière à être certain que ce que l’Etat faisait avant, sera mieux fait par les régions, et surtout que l’Etat a la capacité financière d’accompagner ces collectivités territoriales décentralisées pour mieux faire leur travail. M’adossant à ce que le président de la République a dit dans son message de fin d’année, la politique publique de la décentralisation se porte bien, conformément à ses hautes instructions.

Qu’est-ce qui a présidé au choix des compétences qui ont été transférées aux régions en 2021 ?
Ce sont des compétences qui devaient à la fois être significatives, mais également  d’application simple sans qu’elles induisent des coûts financiers très importants. Si nous prenons le secteur des transports, il s’agit de s’assurer que les régions vont devenir des opérateurs dans l’organisation du transport interurbain. En matière de tourisme, il s’agit de s’assurer qu’elles vont avoir la capacité d’organiser des activités touristiques susceptibles de rendre notre territoire attractif, pour ne prendre que ces cas. Il fallait à la fois des compétences dont l’identification est facile et dont l’exercice peut être confié à des instances nouvelles qui n’auraient pas besoin au début que l’on investisse beaucoup d’argent. Comme le président de la République a dit, c’est patience, prudence et maîtrise. C’est cette perspective qui a été le fil conducteur qui a fait en sorte les premières compétences transférées soient celles-là.

On peut avoir la certitude aujourd’hui que les moyens financiers qui vont avec ces compétences vont suivre ?
La loi portant Code général des collectivités territoriales décentralisées indique que l’Etat transfère les compétences, pas seulement les ressources financières, mais celles matérielles et humaines qui permettent l’exercice de ces compétences. Il est maintenant question pour le gouvernement que toutes les parties prenantes à ce processus se mettent ensemble pour faire de bonnes évaluations de ce que ces ressources financières, humaines et matérielles sont. C’est pour cela que vous aurez observé que le ministère de la décentralisation et celui des finances sont entrés dans une discussion qui va permettre que, avec les régions, nous déterminions ce qui est convenable. Pour calmer les impatientes et dissiper toutes craintes, ces compétences étaient déjà exercées par l’Etat. On peut dire, et sans que l’on ait de grandes marges d’erreur, que l’on connaît les volumes financiers que l’Etat utilisait pour ces compétences. On peut évaluer et identifier les ressources humaines qui étaient mises à contribution et l’environnement matériel qui permet le plein exercice de ces compétences, à charge pour les régions d’être organisées afin de recevoir tout cela.

On relevé que la Dotation générale de la décentralisation est passée de 50 milliards de F en 2020 à 232 milliards de F en 2021. Qu’est-ce qui a permis cela ?
Il s’est agi pour l’Etat d’être plus précis dans le travail qu’il fait. Je pourrais dire qu’il n’y a pas toujours eu la bonne manière de comptabiliser les ressources que l’Etat mettait à disposition dans le cadre de la décentralisation. Il y a beaucoup de transactions qui étaient prises en charge par l’Etat et dont on ne faisait pas toujours ressortir les coûts. Il s’est donc agi dans un premier temps que tous les coûts induits par le processus en termes d’activités et de procédures soient évalués et comptabilisés. Il y a également eu un relèvement du niveau des ressources que l’Etat met à la disposition des collectivités territoriales décentralisées. Ces chiffres vont croître au fur et à mesure que les compétences vont être transférées. C’est de mon point de vue un élément de crédibilisation du discours du président de la République qui ne se contente pas de dire que l’on va accélérer le processus.

Il y a la révision de la loi portant fiscalité locale qui est toujours attendue ?
Les questions de fiscalité sont délicates parce qu’elles ne se gèrent pas uniquement au niveau national. Nous sommes dans un environnement où les Etats se mettent ensemble. C’est le cas de la CEMAC. Cela a un impact sur nos finances publiques, dont sur notre fiscalité. Lorsque cela est rendu au niveau local, nous faisons plus attention. Toutefois, il y a eu des prescriptions du président de la République, sur la révision de la fiscalité locale. Le dossier est suivi par le Premier ministre, chef du gouvernement. Avec l’aide du Fonds monétaire international, le ministère des finances, celui de la décentralisation, les autres parties prenantes, ont engagé une grande réflexion dans le cadre d’un groupe de travail piloté par l’administration en charge des questions financières. Une première mouture de la copie a été rendue et soumise aux arbitrages du Premier ministre, chef du gouvernement. Il a pensé que l’on pouvait densifier la réflexion. Nous avions voulu à l’époque que la session budgétaire de fin d’année connaisse l’examen de ce texte. Mais pour des raisons que je viens d’évoquer, cela n’a pas pu être fait. Mais il est rendu à un stade où nous pensons qu’on pourrait l’avoir au cours de l’année qui commence. L’état du dossier nous dira au cours de quelle session cela va être possible. Les questions de cette délicatesse connaissent un cheminement qui fait que toutes...

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