Quand on aime, on ne tue pas !

« Requiem pour un fou ». Un succès lors de sa sortie en février 1976. Johnny Hallyday occupe la tête du hit-parade français avec ce tube. A la mort du chanteur en 2017, la chanson a fait un retour remarqué mais s’est offert une polémique le mois passé. Un candidat de l’émission « N’oubliez pas les paroles » l’interprète, suscitant l’ire de nombreuses associations féministes. Et pour cause, celles-ci estiment qu’en 2023, on ne peut plus passer à une heure de grande écoute et chanter : « Je ne suis qu’un fou. Un fou d’amour (…). Je l’aimais tant, que pour la garder, je l’ai tuée. Pour qu’un grand amour vive toujours, il faut qu’il meurt d’amour ». Porté par la voix de velours de Johnny, le message de cet homme qui vient d’abattre sa femme s’apprêtant à le quitter, ne choquait pourtant personne depuis sa sortie. Peut-être parce qu’elle se faisait l’écho d’une époque où ce qu’on qualifie de « crime passionnel » faisait planer comme un parfum de sensationnel et de romanesque. Malgré la violence. Malgré les coups. Malgré le sang. Malgré la mort.
Un crime passionnel, dans sa définition souvent controversée, est un meurtre ou une tentative de meurtre dont le mobile se trouve dans la passion ou la jalousie amoureuse. Notre actualité, depuis quelques années, est en tout cas polluée par des affaires sordides de ce genre. Parmi les plus récentes, l’affaire Mendomo du nom de cette femme surprise avec son amant par son époux, qui les obligera à passer à l’acte devant la caméra de son téléphone. Non sans avoir porté des coups de machette à son rival. A Douala récemment, c’est un homme, soupçonnant sa copine d’avoir une autre relation, qui aura recours, une fois de plus à une machette, sur les deux amants pris en flagrant délit. On ne revient pas sur les drames de Nanga-Eboko, il y a quelques mois et ailleurs à travers le pays. Sans oublier ceux qui sont passés sous silence. 
De toute façon, la rubrique « Faits divers » est suffisamment alimentée par ces tragédies. Impossible toutefois d’avoir des chiffres fiables de ce phénomène vieux comme le monde. On a beau être dans une époque moderne qui tend à affirmer l’égalité du genre, on reste dans les faits dans un modèle où les hommes ont vocation à régner sur le couple, en s’octroyant un droit de vie ou de mort. Car ces crimes se présentent majoritairement comme une affaire d’hommes, avec les femmes en principales victimes. Même si la gent féminine n’est pas en reste. Seulement, la balance des faits relayés penche souvent du côté du sexe dit fort. D’où la difficulté à se faire une idée réelle sur leur vraie implication dans ces crimes commis au nom de l’amour. Mais de quel amour parlons-nous ici ?
Une étude d’experts de la Commission nationale des droits de l’Homme et des libertés en 2020 lors d’un séminaire sur le thème « Crimes passionnels et la banalisation des violences conjugales » avait fait ressortir des motivations qui relevaient plus de l’amour-propre que de l’amour. On peut aussi y ajouter la question de la santé mentale. Dans une interview à Echo santé en mai 2023, le Dr Laure Mengueme, médecin-psychiatre et sous-directeur de la santé mentale au ministère de la Santé affirmait déjà sur le sujet que « ce qui se passe dans les couples, c’est ce qui se passe dans toute la société ». En gros, cette violence dans l’intimité ne serait que le reflet de ce mal-être désormais généralisé et des problèmes de santé mentale si souvent ignorés dans notre contexte. Or, les fous ne sont pas toujours ceux qu’on croit. 
 « J’ai tout fait pour elle ». « Elle ose me tromper sous mon toit, dans notre lit ». « Comment elle peut imaginer me quitter ? ». Telles sont certaines des excuses bien rodées censées justifier l’inimaginable. On continue parfois d’être pris de pitié pour un homme qui vient de massacrer sa compagne, qu’il chérissait encore quelques heures plus tôt, parce qu’il se découvre cocu ou qu’elle veut le quitter. On essaye de comprendre. Car quelque part, c’est lui la victime dans l’histoire non ? En France, jusqu’en 1975, le droit pénal relativisait ce genre de crimes, trouvant même des circonstances atténuantes aux coupables. Son article 324 disait : « Le meurtre commis par l’époux sur l’épouse, ou par celle-ci sur son époux, n’est pas excusable (...) Néanmoins, dans le cas d’adultère, prévu par l’article 336, le meurtre commis par l'époux sur...

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