Ottou Marcellin : 50 ans plus tard…

En cette année 2024, le chanteur Ottou Marcellin célèbre 50 ans de pratique musicale sans discontinuité. Des noces d’or marquées par le spectacle du 12 octobre dernier au Palais des congrès de Yaoundé. Accompagné d’un casting relevé composé de Toto Guillaume, Donny Ewood, Isnebo, Atebass, Tonton Ebogo, Ateh Bazore, Kéguégué international, l’artiste a revisité quelques plages d’une playlist de plus de 300 chansons composées. Au lendemain de cette première scène sans fille Frédérique Ottou, Ottou Marcellin marque un temps d’arrêt devant le rétroviseur pour évoquer quelques grands moments de son odyssée musicale.   

La première chanson « Up eyes » est sortie en 1975. C’était quoi l’histoire derrière ? 
Elle est liée à un doigt infirme depuis la petite enfance. Ce doigt me pose des problèmes pour plaquer des accords de Sol. J’avais créé un exercice pour sol-do-ré, ré-do-sol. Et cette mélodie est restée durant des semaines et des mois dans ma tête. Après, j’ai commencé à imaginer les paroles de la chanson et c’est comme ça que ce titre est né.


50 ans de carrière musicale à votre actif. Le presque septuagénaire que vous êtes l’avait-il planifié ? 
J’avais appris à jouer de la guitare pour draguer les filles. J’avais remarqué que durant les concerts scolaires au Collège Vogt, le batteur ou encore le pianiste n’était pas acclamé. Par contre, celui qui joue la guitare ameutait les foules. Moi, je ne voyais pas venir tout ce que je fais aujourd’hui. J’adore la guitare qui a un son particulier. Le son acoustique sans branchement m’émeut. Parallèlement, j’aime aussi les lettres, les mots pour parler des situations, des faits, des pensées. Ça nous manque aujourd’hui avec la dépendance aux technologies.


Lorsqu’on évoque « La roue libre ». Qu’est-ce que cela suscite en vous ?
Le programme de feu Lucien Mamba créé sur les ondes de Radio Cameroun. C’est cette émission qui me révèle avec les Essindi Mindja, Coco Ateba, Narcisse Kouokam, Kéguégué, etc. C’est à la radio que j’ai l’opportunité de me présenter au concours « Découvertes Rfi ».


Quelle est la stratégie derrière le Prix Découvertes Rfi que vous remportez en 1982 ? 
J’étais très ému. Je prenais l’avion pour la première fois. Toute ma famille m’avait accompagné à l’aéroport et elle ne savait même pas où j’allais. Un an auparavant, j’avais raté le concours « Découvertes Rfi ». J’avais envoyé « Up eyes » qui n’avait pas accroché le jury. Quand j’écoute les lauréats de 1981, je me rends compte qu’il faut que j’écrive une chanson susceptible d’accrocher à travers un thème universel. C’est ainsi que j’écris « Où va l’Afrique ? » qui me permet de remporter le prix au Togo. À Lomé, je découvre la télévision et je décroche une nouvelle récompense : le Prix spécial Eyadema qui m’a permis d’être reçu par le chef de l’État.


Comment s’est passée la collaboration avec Francis Kingue et l’Orchestre national ?
Je lui dois ainsi qu’à l’orchestre l’enregistrement de la musique que l’on envoyait sur la bande à Rfi. C’est un monsieur d’une rigueur incroyable. Grâce à lui, je découvrais l’environnement d’un enregistrement grandeur nature pour la première fois.


Comment gère-t-on le succès à moins de 30 ans au début des années 80 ? 
J’ai la chance qu’il n’y avait pas la télévision. Je suis célèbre, les gens parlent de moi et pensent que c’est un adulte au regard de la qualité des textes de mes chansons. Il n’est pas facile d’être une vedette. Tout te tombe dessus, l’argent, les filles, les femmes mariées parfois. Si tu n’as pas une éducation correcte, tu peux t’exposer. On est même exposé à l’agression physique. Je me souviens toujours de la chanson « Où va l’Afrique ? » que je joue à la radio. Des policiers en civil m’attendaient à la sortie de la radio dans une voiture banalisée. On m’a demandé de monter à bord pour m’apprendre à réfléchir. Euphoriques, mes amis pensent que j’ai trouvé un producteur, pourtant j’ai reçu trois jours de baston. Une expérience pareille te marque quand tu es jeune et, au fil du temps, tu te rends compte que les œuvres artistiques ne sont pas innocentes et peuvent être confrontées à d’autres idéologies ou courants politiques.


La vie sans votre fille Frédérique Ottou disparue l’an dernier…
Il n’a jamais été question d’abandonner la musique. Je dois continuer de l’honorer. La chance qu’elle a eue, c’est d’avoir un papa qui a longtemps flirté avec l’environnement de la musique. J’ai essayé de lui apprendre comment gérer une carrière musicale. C’est-à-dire faire la diff...

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