Péage routier : qui a peur de l’automatisation ?

Cette question déjà vieille d’une quinzaine d’années mérite à nouveau d’être posée parce qu’elle reste d’une brûlante actualité. La problématique de la sécurisation des recettes issues du péage routier au Cameroun revient en effet au-devant de la scène après la signature, le 10 juin dernier à Yaoundé, de l'accord direct et de la convention de collecte qui confient au partenaire privé TOLLCAM plusieurs missions : la conception, le financement, la construction, l'équipement, l'exploitation et la maintenance de 14 postes de péages automatiques. Et du coup, les Camerounais ont recommencé à rêver du jour où les mauvaises pratiques en cours dans plusieurs de ces postes vont cesser. A dire vrai, ils sont encore nombreux, les compatriotes qui, malgré les progrès enregistrés, doutent de la volonté d’informatiser le système. Un projet dont on parlait déjà avec insistance à la fin de la décennie 2000-2010. Les retards dommageables n’ont fait que conforter l’incrédulité d’une bonne partie de l’opinion qui se demande, au fond, qui a peur de l’automatisation du péage routier dans notre pays.                                                                                                                                       Même le début, le 10 juin 2022, de la phase d’exécution du contrat de partenariat public-privé signé en 2020 par l'Etat et TOLLCAM pour automatiser 14 postes sur certaines routes bitumées du réseau camerounais a également pris du retard. Les raisons sont certes connues - négociations laborieuses entre TOLLCAM et ses prêteurs - mais il va falloir cette fois-ci que tout soit mis en œuvre pour que démarre effectivement le chantier sur le terrain. On sait que le ministre des Travaux publics (Mintp), Emmanuel Nganou Djoumessi, a engagé l'entreprise à faire preuve d'efficacité ; à respecter scrupuleusement le planning d'exécution des travaux qu'il devra communiquer ; à contenir les délais par une meilleure organisation interne ; et à enchaîner rationnellement les prestations. Pour ce faire, il a demandé au partenaire privé de construire un poste de péage automatique-témoin dans un délai de six mois et que celui-ci soit aménagé et mis en service. Histoire de convaincre les plus sceptiques. Ces injonctions, dit-on, ont été prises comme un challenge par l’entreprise qui affirme avoir immédiatement « commencé les travaux sur les sites de Mbankomo, Boumnyebel, Edéa et Nsimalen où des installations de chantier ont déjà été effectuées », lit-on sur le site Internet du Mintp.                                                                                                         Quoi qu’il en soit, en dépit du temps qui passe, l’impatience des populations ne faiblit pas. Leurs attentes aussi. On se souvient qu’en 2008, les statistiques officielles révélaient l’ampleur des pertes des recettes collectées pour justifier l’urgence de l’automatisation des postes de péage devenus des vaches à lait pour des agents publics véreux. La situation était si préoccupante que Inoni Ephraïm, alors Premier ministre, chef du gouvernement, avait poussé un cri d’alarme doublé d’un coup de gueule. C’était le 11 janvier 2008 exactement, à l’ouverture de la troisième session du Conseil national de la route dans ses services. Le PM avait protesté contre le fait que les recettes issues du péage routier manuel avaient plutôt chuté drastiquement malgré la construction de nouvelles routes bitumées équipées de nouveaux postes. Pour arrêter la saignée, il avait instruit le ministre des Travaux publics de l’époque d’accélérer la mise en œuvre du projet d’automatisation de la gestion des postes de péage. Le processus devait commencer, selon ses directives, par les postes situés sur le triangle routier Yaoundé-Douala-Bafoussam-Yaoundé qui génère environ 75% des recettes. Justifiant le bien-fondé de la nouvelle approche, le chef du gouvernement avait indiqué des chiffres renversants. Entre 2001 et 2005, quand les postes de péage étaient pilotés par un Comité interministériel, cinq milliards de F étaient collectés chaque année, avait-il déclaré. Puis, le Programme de sécurisation des recettes routières (PSRR) créé le 14 mars 2005 est entré en jeu. « Mais, il est paradoxal que de 2005 à nos jours (Ndlr : début 2008), les recettes ont baissé pour se situer à trois milliards de F environ », dénonçait Inoni Ephraïm. Très remonté, il enchaîna les instructions, demandant au ministre des Finances de faire réaliser sans délai un audit afin de ressortir les causes de cette déperdition des fonds publics. Le contrôle général de la comptabilité et de la gestion des postes de péage manuels avait-il été effectué et quelles en étaient les conclusions ? Difficile de le savoir.                                                                                                                              Par contre, ce dont on est certain, c’est qu’il n’y a pas eu jusqu’ici des améliorations remarquables dans ce secteur, même si les chiffres d’aujourd’hui sont légèrement en hausse par rapport à ceux d’il y a 14 ans. En tout état de cause, à en croire Josué Lihinack, Coordonnateur national du PSRR, entré en fonction en juillet 2021, les recettes augmentent. « Les chiffres étaient bloqués à 6 milliards de F par an jusqu’en 2020 mais ils ont dépassé 7,3...

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