« Presque tout le patrimoine historique du Cameroun est aujourd’hui en Allemagne »

Bénédicte Savoy, universitaire, historienne de l’art, spécialiste des questions de restitution.

Que peut-on retenir de vos échanges avec le Comité interministériel en provenance du Cameroun ?
D’abord, c’est une belle première rencontre. Je crois qu’il était temps que l’équipe de recherche qui a travaillé depuis trois ans ici à Berlin avec l’université camerounaise de Dschang sur ces questions patrimoniales rencontre le Comité interministériel national qui travaille sur ces questions, du côté camerounais. Un beau premier contact, je dirai, très intense, très riche. Ce qu’il faut en retenir surtout c’est le désir de part et d’autre de coopérer, de travailler, de prendre le temps qu’il faut pour arriver à des résultats fondés sur une très bonne connaissance du dossier.

Vous avez fait un travail qui a permis de répertorier ces biens culturels camerounais issus du contexte colonial. Ce travail est-il exhaustif ?
Oui, on peut le dire. Nous sommes partis d’une méconnaissance totale sur la présence du patrimoine ancien camerounais en Allemagne. On pensait qu’il y avait peut-être une dizaine de milliers d’objets. Mais avec nos recherches, on est arrivé à un chiffre de 40 000 pièces venues du Cameroun avant 1919 dans les collections allemandes. C’est un chiffre considérable, c’est énorme, et presque tout le patrimoine historique du Cameroun est aujourd’hui en Allemagne, pour des raisons historiques qui probablement ne peuvent pas continuer au 21e siècle.

Quelles sont les pièces les plus rares citées dans ces collections détenues ici en Allemagne ?
C’est difficile de dire quelles sont les plus rares, car toutes sont rares au sens où ce genre de pièces qui se retrouvent dans les musées sont toujours uniques et authentiques. Elles n’existent pas deux ou trois fois. Et certaines ont une réputation internationale plus grande, soit parce qu’elles sont réclamées depuis très, très longtemps, soit parce qu’elles sont de très grand format. Je pense par exemple aux tambours parlants qui servaient à la communication entre les communautés, qui pèsent plusieurs centaines de kilos et qu’on retrouve ici en Allemagne. Je pense aussi à ce qu’on appelle des statues dans les musées européens, mais qui sont bien plus, car elles sont l’incarnation d’un royaume. C’est le cas du « Ngonnsô » par exemple, entre autres.

De nombreux biens camerounais se retrouvent aussi éparpillés dans des collections privées. Sont-ils pris en compte ?
Ce sont des réserves qui peuvent être plus importantes encore que les 40 0...

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